Le Musée de la Résistance et de la Déportation de Besançon fait peau neuve

Le Musée de la Résistance et de la Déportation de Besançon fait peau neuve

Le 8 septembre 2023, le Musée de la Résistance et de la Déportation de Besançon rouvrira ses portes au public. Fermé depuis janvier 2020, il a fait l’objet d’une rénovation complète de son exposition permanente, projet de longue haleine envisagé dès les années 2000 puis progressivement imaginé, engagé et conçu à partir de 2012. Il se distingue dans le paysage muséographique français sur la Seconde Guerre mondiale (1939-1945) par la précocité de son existence — il est inauguré pour la première fois en 1971 — et l’originalité de son approche. Trois traits le caractérisent :

  1. Il est un site mémoriel : avec ses 100 fusillés entre 1941 et 1944, la citadelle de Besançon est l’un des hauts lieux de la répression de la Résistance dans la France occupée.
  2. Il possède des archives et des collections riches et variées portant sur la Résistance, sur les formes de la déportation, de l’univers et de l’expérience concentrationnaires, mais aussi sur l’écriture de l’histoire et l’historiographie.
  3. Il fait du savoir un élément essentiel de transmission par le choix affirmé d’un discours fondé sur la recherche et ouvert aux évolutions des questionnements scientifiques.

Deux fils directeurs : individus et sociétés en guerre, mots et langages

Ces trois traits (site, collections, connaissance) forment l’identité du musée et orientent les grandes thématiques développées dans le parcours. Ils inspirent l’articulation entre tradition de réflexion sur la transmission et construction d’un musée ouvert aux problèmes que pose aujourd’hui la compréhension des grands événements de la Seconde Guerre mondiale, de leurs héritages et de leurs usages mémoriels. Musée d’histoire et outil citoyen, il affiche l’ambition d’associer à la connaissance du passé le questionnement sur les enjeux contemporains de la citoyenneté et sur les valeurs qui portent l’engagement démocratique. Deux fils directeurs structurent le discours historique et guident le parcours muséographique : « individus et sociétés en guerre » et « mots et langages ».

Le premier s’attache à restituer la place des acteurs sociaux confrontés d’une part à la guerre et à ses violences extrêmes, d’autre part à des régimes et des idéologies d’oppression, d’occupation, de répression, de persécution et d’extermination. Centrée sur les comportements, attentive aux formes de réactivités sociales, aux engagements et aux possibilités d’agir des personnes insérées dans les sociétés de leur temps, la focale adoptée interroge la citoyenneté en guerre en prenant appui sur les acquis les plus récents de la recherche scientifique. Le second fil directeur oriente le choix d’exposition des collections du musée. L’approche par les mots et les langages propose une clé de lecture destinée d’abord à décrypter les techniques d’endoctrinement par la langue et par la propagande (nazisme, gouvernement de Vichy, Occupation allemande). Les objets, les œuvres et les documents exposés tout au long du parcours opposent ainsi à l’emprise idéologique et à la négation des valeurs humanistes la conscience de l’événement et la dignité. Ils illustrent le poids et l’esprit des mots interdits, la réappropriation de la parole, la force de l’écriture et des multiples formes d’expression clandestines : correspondance et journaux personnels, tracts et presse de la Résistance, lettres de fusillés, écrits en prison, fabrication d’objets et art en déportation.

Quelles thématiques ? La Seconde Guerre mondiale à l’échelle des acteurs

L’exposition permanente, située au premier étage, déploie sur dix salles neuf thèmes :

  1. L’Allemagne nazie dans l’Europe des années 1930
  2. L’effondrement, 1940
  3. Les Français sous Vichy et l’Occupation, 1940-1944
  4. Des résistances à la Résistance
  5. Vies en sursis. Persécution et répression, 1940-1945
  6. Déportation et système concentrationnaire, 1933-1945
  7. Extermination et génocide, 1933-1945
  8. La fin ? Libérations, 1944-1945
  9. Reconstruire – Transmettre – Hériter

Des voix et des visages

Chaque salle est dotée d’un ou plusieurs objets phares : l’objectif étant à la fois de valoriser les collections du musée et d’incarner chaque thématique mais aussi d’amener le visiteur à questionner et contextualiser l’objet ou l’archive, d’en interroger sa signification et d’exercer son esprit critique. Par ailleurs, de nombreuses cartes et infographies originales, quelques petits films de transition, la diffusion d’extraits de témoignages ou de lectures de lettres et de journaux personnels ainsi que plusieurs dispositifs multimédias (journal personnel de Jeanne Oudot, fusillés de la citadelle) appuient le discours et permettent ainsi d’approfondir la visite. Enfin, parmi les voix et les visages présents tout au long du parcours, l’exposition suit plus spécifiquement le destin de trois personnalités qui incarnent à la fois les thématiques, les questionnements et les collections du musée : Jeanne Oudot, Henri Fertet et Germaine Tillion.

Deux salles d’art en déportation

Avec plus de 600 œuvres, le musée possède l’une des plus riches collections d’art en déportation d’Europe. Deux nouvelles salles seront entièrement dédiées à leur exposition. Œuvres de résistance à la déshumanisation, les nombreux objets, peintures, dessins, sculptures seront présentés à la fois sous l’angle artistique et comme sources d’histoire apportant à leur manière une documentation précieuse sur le fonctionnement de l’univers concentrationnaire nazi et sur la vie des déportés.

Un nouvel accueil, une salle pédagogique et des espaces pour les expositions temporaires.

Au rez-de-chaussée, le musée proposera désormais des espaces entièrement dédiés à des expositions temporaires. La toute première, essentiellement photographique, sera consacrée aux donateurs et au parcours du don, de l’archive ou de l’objet personnels à leur patrimonialisation.

1971-2023 : une institution muséale cinquantenaire

L’ouverture le 17 juillet 1971 du musée de la Résistance et de la déportation de Besançon marque un tournant dans la manière d’exposer les événements de la Seconde Guerre mondiale. Musée d’histoire, il accorde une place essentielle à la démarche scientifique et documentaire.

L’idée revient à Denise Lorach : rescapée du camp de concentration de Bergen-Belsen, elle crée une association fondatrice fin 1967. Très vite, elle sollicite l’aide d’Henri Michel, secrétaire général du Comité d’histoire de la Seconde Guerre mondiale. Il apporte au projet bisontin une caution scientifique, un appui institutionnel, des collections et conseille le nom d’un scénographe de l’Institut national de la recherche pédagogique, Guy Langlois. François Marcot, alors étudiant en maîtrise d’histoire, rejoint en janvier 1971 la petite équipe à laquelle contribue aussi Simone Dubois, enseignante d’histoire. Dans un contexte mémoriel marqué par la mise en cause de la Résistance et par le développement du négationnisme, le musée de Besançon devient une référence et connaît un véritable succès public avec plus de 50000 visiteurs par an. Il s’agrandit et se transforme au fil du temps. Installée dans des locaux plus vastes, une nouvelle exposition est ouverte en juin 1982. Lieu de connaissance doté d’un centre de documentation, il se donne pour mission de collecter et de conserver archives, objets et œuvres d’art confiés par des donateurs privés.

Au cœur des années 1970, le musée de Besançon détonne dans le paysage muséal de la Seconde Guerre mondiale. Il est, à bien des égards, un établissement original et novateur : structure associative soutenue par la Ville ; appui unanime des organisations régionales issues de la Résistance et de la déportation ; équipe de conservation associant un témoin, Denise Lorach, et un jeune historien né après la guerre, François Marcot ; choix d’un discours historique fondé sur une approche généraliste et distanciée du passé.

Aujourd’hui, l’exposition rénovée du musée se veut à la fois fidèle et inventive, dans le prolongement de ses deux devises :

« Ne pas témoigner serait trahir »

« Ceux qui ne se souviennent pas du passé sont condamnés à le revivre ».

Informations pratiques

Une première session de réservations pour les scolaires sera proposée à partir du 4 septembre 2023 pour la période septembre-décembre 2023. Une seconde session de réservations sera proposée au cours du mois de novembre 2023 pour la période février-juin 2024. La citadelle est fermée au public chaque mois de janvier.

Réservation citadelle : 03 81 87 83 33

Médiation :

mediation.resistance@citadelle.besancon.fr

Site internet :

https://www.citadelle.com/a-voir-a-faire/musee-de-la-resistance-et-de-la-deportation/

Le Musée de la Résistance et de la Déportation est référencé sur Adage.

Trois webinaires sont prévus en septembre et octobre 2023 ainsi que la diffusion d’une capsule qui présentera la rénovation du musée et l’offre pédagogique qui sera proposée.

Cécile Vast

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